Tout savoir sur la clause d’habitation bourgeoise

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immeuble parisien Phillip Minnis/123RF

Les règlements de copropriété définissent l’usage des biens immobiliers pour préserver l’équilibre et l’harmonie entre les occupants. Pour cette raison, la clause d’habitation bourgeoise, souvent mentionnée dans ces documents, interdit certaines activités dans les immeubles. Comment fonctionne cette clause ? Cet article vous apporte toutes les réponses. 

Qu'est-ce qu'une clause d'habitation bourgeoise ?

La clause d’habitation bourgeoise encadre strictement l’usage des logements.

Son objectif principal : préserver le caractère résidentiel des immeubles en interdisant les activités susceptibles de générer des nuisances. Son application varie en fonction des dispositions adoptées par chaque copropriété et des décisions jurisprudentielles.

Définition et principes fondamentaux

Cette clause trouve son origine dans le Code civil, notamment aux articles 8 et 9 de la loi du 10 juillet 1965 régissant la copropriété des immeubles bâtis. Ces dispositions permettent d’imposer des règles spécifiques quant à l’usage des lots de copropriété.

Il existe 2 degrés d’application de cette clause :

  • habitation bourgeoise stricte : aucune activité professionnelle ou commerciale n’est autorisée dans la copropriété ;
  • habitation bourgeoise simple : certaines professions libérales peuvent exercer sous conditions ;

Bon à savoir : La destination d'un immeuble en copropriété est généralement l'habitation. Toutefois, elle peut également être mixte et lier habitation et commerce.

Cadre juridique et application de la clause

La présence d'une clause d'habitation bourgeoise dans le règlement de copropriété impose aux copropriétaires et locataires de respecter l'usage défini pour les lots concernés. Le non-respect de cette clause peut entraîner des sanctions, telles que la résiliation du bail ou des actions en justice pour faire cesser l'activité non conforme.

Bon à savoir : Les règlements de copropriété précisent généralement si la clause s'applique de manière stricte ou aménagée.

Mais la jurisprudence française a évolué concernant l'application de cette clause, notamment en ce qui concerne les locations meublées de courte durée. Par exemple, la Cour d'appel de Grenoble, dans un arrêt du 23 mai 2023, a rappelé que la location meublée de tourisme est incompatible avec une clause d'habitation bourgeoise exclusive. Le tribunal considère en effet cette activité comme commerciale et donc contraire à la destination de l'immeuble.

Les propriétaires et les locataires sont donc appelés à consulter le règlement de copropriété avant d'entreprendre une activité particulière dans un bien soumis à une telle clause. En cas de doute, il est recommandé de solliciter l'avis d'un professionnel du droit immobilier pour éviter tout litige ultérieur.

Interdictions et exceptions liées à la clause d'habitation bourgeoise

L’application de la clause d’habitation bourgeoise impose des restrictions strictes aux occupants des immeubles concernés. Mais ils peuvent bénéficier, dans certaines mesures, de quelques assouplissements.

Quelles sont les activités interdites par la clause d'habitation bourgeoise ?

La clause interdit principalement les activités commerciales et artisanales. Ainsi, un local d’habitation ne peut pas être utilisé pour exploiter un commerce, un restaurant, une boutique ou un atelier. Cette restriction repose sur l’article L.631-7 du Code de la construction et de l’habitation, qui impose une autorisation administrative pour tout changement d’usage d’un local d’habitation.

Exceptions à la clause et aménagements possibles

Malgré ces restrictions, certaines professions bénéficient d’un traitement particulier. C’est le cas :

  • des professions libérales sans réception de clientèle ;
  • des activités administratives exercées depuis le domicile (ex. : télétravail, gestion d’une société sans accueil de clients) ;
  • des locations meublées sous conditions, notamment lorsqu’elles respectent l’usage résidentiel du logement.

Mais pour obtenir une dérogation, un propriétaire doit :

  • demander l’autorisation à l’assemblée générale des copropriétaires ;
  • obtenir une autorisation administrative si un changement d’usage est nécessaire ;
  • respecter les règles d’urbanisme et les dispositions locales, comme celles imposées par la Mairie de Paris en matière de location saisonnière.

Bon à savoir : Dans une copropriété à habitation bourgeoise simple, l’activité d’avocat, de médecin, de notaire et d’architecte peut être tolérée si elle ne génère ni nuisances ni flux excessif de clientèle.

Conséquences pour les propriétaires et locataires

L’application de la clause d’habitation bourgeoise a des impacts directs sur les propriétaires et les locataires. Elle limite certaines formes d’exploitation immobilière et impose des obligations spécifiques.

Droits et obligations des propriétaires

La clause d’habitation bourgeoise vise à assurer aux propriétaires un cadre de vie résidentiel et paisible. Ils ont la possibilité d’agir en justice en cas de non-respect des règles établies.

Si un occupant exerce une activité commerciale ou professionnelle interdite par la clause, les copropriétaires peuvent demander la cessation de cette activité ou réclamer des dommages-intérêts en cas de préjudice.

La clause d’habitation bourgeoise permet également de préserver le standing de l’immeuble et de protéger la valeur des biens immobiliers. En évitant la présence d’activités perturbatrices, cette disposition contribue à maintenir un environnement harmonieux et attrayant pour tous les résidents.

Cette clause implique à la fois des droits importants et des obligations pour les copropriétaires. Ainsi, lorsqu’un bien immobilier est loué, le propriétaire doit informer le locataire de l’existence de cette clause et des restrictions qui en découlent. Cette information doit figurer dans le contrat de location pour garantir que le locataire est conscient des règles qui régissent l’usage du bien.

Impact sur la location (Airbnb, …)

Les droits et les obligations des propriétaires garantissent le caractère résidentiel de l’immeuble. Cependant, cette vocation se heurte parfois à certaines pratiques récentes, telles que la location meublée touristique via des plateformes comme Airbnb. Cette pratique suscite régulièrement des problématiques juridiques face aux restrictions imposées par le règlement de copropriété.

En effet, la Cour de cassation, dans un arrêt non publié du 27 février 2020 (n°18-14.305), a confirmé l’interdiction d’exercer une activité de location saisonnière dans un immeuble à destination bourgeoise. Cette décision souligne que le règlement de copropriété prévaut sur les pratiques de location touristique, malgré leur popularité.

Le non-respect des dispositions du règlement de copropriété peut entraîner des sanctions significatives pour les propriétaires. Ces sanctions sont en général d’ordre civil, administratif et financier. Par exemple, dans un jugement du 5 avril 2012, le président du Tribunal de grande instance de Paris a condamné un bailleur pour avoir loué illégalement quatre appartements en meublé touristique. Le tribunal lui a ordonné de rétablir l’usage d’habitation, sous peine d’une astreinte de 200 euros par jour et par logement en cas de non-exécution.

Les municipalités disposent également de moyens de contrôle pour sanctionner les propriétaires qui ne respectent pas les réglementations sur la location meublée touristique. À Paris, par exemple, des amendes peuvent être infligées en cas d’infraction. Depuis la loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016, l’article L. 651-2 du Code de la construction et de l’habitation prévoit une amende pouvant atteindre 50 000 euros par logement en cas de non-respect des autorisations requises. De plus, une astreinte de 1 000 euros par jour et par mètre carré peut s’appliquer jusqu’à la régularisation.

Des décisions de justice viennent confirmer ces sanctions. À titre d'exemple, une société a écopé d'une amende de 15 000 euros en raison de la mise en location d'un meublé de tourisme sans avoir obtenu l'autorisation requise.

En conclusion, la clause d'habitation bourgeoise veille à préserver le caractère résidentiel des immeubles en copropriété. Elle impose des restrictions strictes sur les activités commerciales, artisanales et parfois même sur les professions libérales. Bien que certaines exceptions soient tolérées, elles nécessitent souvent l'accord des copropriétaires et doivent respecter le cadre légal en vigueur.

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